Yaovi Sronvie: ‘Il faut que les parents jouent convenablement leur rôle d’éducateur …’
La communauté africaine observe ce vendredi 16 juin la Journée de l’enfant africain. Dans l’interview ci-dessous, Yaovi Sronvie s’est prononcé sur cette célébration axée sur le thème: « Les droits de l’enfant dans l’environnement numérique ». Le président de la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH) a essentiellement abordé l’objectif de cette journée, les menaces qui pèsent sur les enfants dans le monde numérique, les actions que mène la CNDH pour protéger les enfants à cette ère du numérique et les défis en matière de protection des droits de l’enfant au Togo.
Q 1 : Aujourd’hui c’est la journée de l’enfant africain : pouvez-vous nous parler brièvement de cette journée ?
La journée de l’enfant africain est un événement annuel en hommage aux enfants de Soweto en 1976 massacrés par le régime de l’apartheid en Afrique du Sud.
En effet, le 16 juin 1976, des milliers d’élèves Sud-africains sont descendus dans la rue pour protester contre la mauvaise qualité de leur éducation et exiger que soit respecté leur droit à recevoir un enseignement dans leur propre langue. Des centaines de jeunes garçons et filles ont été abattus le jour de la manifestation et pendant les quinze jours qui ont suivi, plus d’une centaine de personnes ont été tuées et plus d’un millier blessés.
C’est en souvenir de ceux et celles qui ont perdu la vie le 16 juin 1976 qu’il a été institué une journée de l’enfant africain depuis 1991 par l’Organisation de l’unité africaine (OUA) aujourd’hui l’Union africaine (UA).
Q2 : Quel est l’objectif de cette journée ?
La journée de l’enfant africain est une occasion pour les gouvernements, les partenaires techniques et financiers, les institutions et organisations de défense des droits des enfants et autres parties prenantes de marquer une pause pour faire une évaluation des politiques et programmes en matière de droits de l’enfant en vue de planifier les actions futures. C’est également une opportunité de rappeler l’importance de soutenir tous les enfants à se mobiliser pour défendre le respect des droits et la dignité de chacun d’entre eux.
Q 3 : Le thème de la journée de l’enfant africain édition 2023 est intitulé « Les droits de l’enfant dans l’environnement numérique ». Pourquoi l’enfant dans l’environnement numérique ?
L’internet a donné des opportunités inestimables pour la réalisation des droits et libertés fondamentales des enfants, tels que le droit à l’éducation, la liberté d’expression et la liberté d’association entre autres. Cependant, en l’absence de mécanismes de protection adéquats, les enfants sont exposés à de grands risques en ligne. L’utilisation déviante des nouvelles technologies et des réseaux sociaux peut entrainer de graves violations des droits de l’enfant, d’où le choix de ce thème.
Q4 : Pensez-vous qu’il faut une nouvelle convention ou un protocole à la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant relativement à la problématique de l’enfant dans la sphère numérique ?
Pas forcément. Il faut relever que les droits des enfants consacrés par la Charte africaine et la Convention relative aux droits de l’enfant s’étendent à la sphère numérique. Ces deux instruments définissent en effet des principes directeurs sous-tendant tous les droits de l’enfant. Ces principes sont relatifs à la non-discrimination (article 3), à l’intérêt supérieur de l’enfant (article 4), à la survie et du développement (article 5), et à la participation de l’enfant (article 7). Ces principes doivent être appliqués dans toutes les mesures prises pour garantir la réalisation des droits de l’enfant dans l’environnement numérique.
Q5 : Quelles sont les menaces concrètes qui pèsent sur les enfants dans le monde numérique ?
Les enfants peuvent être exposés à plusieurs formes de menaces ou dangers tels que:
les TIC intensifient les risques traditionnellement (arnaques, harcèlement sexuel, initiations à des pratiques spirituels pernicieuses, radicalisation…) associés à l’enfance et favorisent de nouvelles formes de maltraitance et d’exploitation comme les contenus pédopornographiques et leur diffusion en direct ;
les forums de jeux et les profils anonymes non protégés sur les réseaux sociaux permettent aux prédateurs surtout sexuels d’entrer plus aisément en contact avec des enfants ;
les mauvaises rencontres et cyber harcèlement (Insultes et diffamation, menaces, chantages, pression psychologique et incitation à jouer à des jeux dangereux ou à la réalisation de défis périlleux…), etc.
Q6 : Qu’est-ce que la CNDH fait ou envisage de faire s’agissant de la protection des enfants dans l’ère du numérique ?
La CNDH a pour mission de promouvoir et protéger les droits de l’homme, y compris ceux des enfants. A ce titre elle organise des activités de sensibilisation et d’éducation aux droits de l’homme à l’intention de toutes les couches socio-professionnelles du pays. Relativement à la question des enfants dans l’environnement numérique, la CNDH mène régulièrement des activités de sensibilisation des enfants et des jeunes sur les avantages et les dangers liés à l’utilisation déviante des réseaux sociaux. C’est à ce titre qu’elle a, cette année, en partenariat avec le ministère des enseignements primaire et secondaire organisé une tournée de sensibilisation dans des établissements scolaires sur les avantages et les inconvénients de l’utilisation des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) par les élèves et surtout l’interdiction du téléphone portable en milieu scolaire.
Pour commémorer l’édition 2023 de la journée de l’enfant africain, la Commission organise à Lomé en partenariat avec la chambre régionale des métiers, des rencontres de sensibilisation sur la même problématique à l’endroit des apprenants de différents corps de métiers. Cette activité sera relayée à l’intérieur par nos antennes régionales sur toute l’étendue du territoire afin de prémunir les apprenants des dangers de l’utilisation déviante de ces outils.
Q7 : Quels sont les défis en matière de protection des droits de l’enfant au Togo ?
Il faut d’abord reconnaître que beaucoup de choses ont été faites en matière des droits de l’enfant. La ratification des principaux instruments de promotion et de protection des droits de l’enfant, l’internalisation de ces instruments dans la législation et la mise en place des institutions et mécanismes pour veiller à leur mise en œuvre.
Cependant, il subsiste de nombreux défis entre autres : la problématique des enfants en situation de rue, les violences faites aux enfants, la protection des enfants en conflit avec la loi, l’insuffisance des centres publics d’accueil et de réinsertion des enfants en situation difficile ou en danger.
Q8 : Quel est le message de la CNDH à l’occasion de cette célébration ?
Je voudrais d’abord exhorter les parents à accroître leur surveillance par rapport aux enfants surtout en cette période de vacances et à jouer convenablement leur rôle d’éducateur pour que la relève soit assurée.
En ce qui concerne les enfants, je les appelle à la prudence sur internet et les réseaux sociaux et au respect de leurs parents et des ainés. Qu’ils profitent des vacances pour relever leur niveau avant la rentrée scolaire 2023-2024.
Je vous remercie